LA FOLIE TRUMP, LA MÉDIOCRITÉ FRANÇAISE

L’élection de Donald Trump renouvelle en profondeur d’immenses questions politiques.

Le désormais président américain a martelé durant sa campagne sa volonté de dénoncer les accords commerciaux liant son pays à la Chine. Il a répété sans qu’aucune équivoque ou interprétation soit désormais possible son souhait de taxer fortement les produits importés auprès de ce pays afin de protéger les producteurs américains.

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S’il met en œuvre cette politique, les conséquences peuvent en être incalculables, à la fois pour les Etats-Unis, l’Europe et la France. La Chine aujourd’hui contribue puissamment au financement de la dette publique américaine. Celle ci, colossale, appelée même à grandir si Donald Trump applique son programme public de grands travaux et baisse significativement les impôts comme il s’y est engagé, pèse modérément sur les marchés financiers du fait de la complaisance chinoise.

Bouleverser cet équilibre, le remettre en cause de manière agressive et unilatérale, peut pulveriser une situation fragile. Les taux d’intérêts alors, et c’est un scénario parmi les plus indulgents, pourraient remonter sérieusement et renchérir ainsi le coût de la dette publique de chaque État. Pour ne parler que de la France, des milliards d’euros seraient en jeu. Ceci remettrait en jeu la croissance et la dynamique des échanges entre pays occidentaux. Ce serait un facteur majeur de récession.

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Autrement dit, nous pourrions payer très cher, nous, Européens, Français, une mesure protectionniste prise aux Etats-Unis.

Quel est notre intérêt objectif? Que Donald Trump devienne un parjure, qui oublie, néglige, l’une de ses promesses phares de sa campagne électorale. Qu’il trahisse ce que certains ont appelé pompeusement le « peuple » américain, négligeant le fait que davantage d’Américains ont voté pour Clinton plutôt que pour Trump, et que les motivations du vote étaient tout autant raciales qu’économiques.

Connaissant ce que nous avons entrevu du personnage, l’hypothèse du renoncement est faible, pour ne pas dire nulle. Donald Trump a raconté n’importe quoi durant sa campagne, sans tenir aucun compte des contraintes et des obligations attachées au statut de la première puissance mondiale du pays qu’il va diriger. L’égoïsme le plus dur a inspiré ses propos de campagne. Il existe un risque majeur que ce même sentiment motive ses premières mesures présidentielles.

Il est un autre aspect de sa politique, plus grave, qui mérite d’être d’ores et déjà souligné.

Donald Trump a souvent dit qu’il réduirait l’effort de la puissance militaire américaine. Il a notamment expliqué que les Coréens du sud ne devraient plus compter sur les USA dans leur dangereux face-à-face avec leurs cousins du Nord. Il a averti les Japonais d’une révision complète de la politique de soutien de l’archipel face à la volonté expansionniste de la Chine. Et enfin, il a signifié aux Turcs et aux pays riverains de la Russie qu’ils ne devraient plus compter sur une aide automatique de l’OTAN en cas d’agression.

On comprend bien les raisons pour lesquelles Vladimir Poutine accueille avec bienveillance ce monsieur Trump, totalement ignorant de l’histoire européenne et des volontés de domination de l’éternelle Russie. On observe aussi ce bouleversement stratégique en cours à l’égard de la Turquie, déjà engagée dans une islamisation qui ne pourra en être que renforcée, parachevant ainsi l’échec d’une tentative diplomatique engagée depuis l’après guerre pour tenter de neutraliser et d’amadouer ce pays tiraillé entre les cultures européenne et arabe.

Surtout, en filigrane, se pose l’immense question de la prolifération nucléaire. Pour compenser son discours d’abandon de rôle de puissance militaire mondiale, Donald Trump, qui n’a si visiblement réfléchi à rien et n’a aucune idée des conséquences de ses propos s’ils devenaient des actes, a déclaré qu’il encouragerait des pays en zone de danger à acquérir l’arme nucléaire.

Depuis l’après guerre, la non prolifération de l’atome est une question cruciale pour l’avenir de l’humanité. Avec quelques échecs et un succès certain, les pays membres permanents du conseil de sécurité de l’ONU ont plutôt réussi à contenir le danger. Entendre le futur président américain tenir un discours laxiste dans cette matière, évoquer l’arme nucléaire comme s’il s’agissait d’une banalité technologique, fait leur, glace le sang et terrifie même d’irresponsabilité crasse.

C’est ici sans doute que l’on touche les limites d’une expression populaire. Donald Trump a été élu de manière régulière. Son accession à la présidence des Etats-Unis est donc légale et légitime. Qu’il soit ignorant, inconscient, aveuglé par un égo qui occulte la raison, ne suffit pas à autoriser un raisonnement sur la remise en cause de son pouvoir. Et pourtant, on en pressent l’usage monstrueux qu’il pourrait en faire pour l’avenir de l’humanité.

Là encore, notre seul espoir réside dans le fait que l’appareil d’Etat ramènera cet homme frustre et inculte à la raison. Nous croisons les doigts pour que des personnalités fortes de la prochaine administration américaine parviennent à le remettre dans le droit chemin en introduisant un peu de raison dans la folie de ses raisonnements.

En d’autre termes, nous souhaitons tous, pour nos intérêts et peut être pour notre survie, que Donald Trump soit significativement et durablement un traitre à sa campagne électorale, et traitre aussi aux engagement pris devant le suffrage universel.

Dès lors surgit, redoutable, une interrogation philosophique sur ce même suffrage universel et sur la démocratie dont il est l’expression: à quoi sert-il de valoriser l’expression de chacun s’il s’agit d’espérer que surtout il n’en sera tenu aucun compte?

L’élection de Donald Trump nourrit des inquiétudes et soulève des questions auxquelles l’humanité n’est confrontée que de manière exceptionnelle et rare. Elles paraissent à ce point importantes qu’il semble même que nous essayons, notamment en France de les éviter. Trop angoissantes peut-être, et que répondre…

Alors, des esprits médiocres préfèrent pointer la faillite des sondages et la défaillances des médias, l’échec des élites et la suffisance des bobos, la défaite enfin d’une « pensée unique » qui n’existe que dans la tête de ceux qui la dénonce.

L’élection de Donald Trump nous interroge gravement et durablement. Et sans doute a-t-il compris, dans sa folie, que nous serons bien incapables de faire face au défi qu’il nous lance, ce qui lui permettra de jouir sans entraves du pouvoir suprême que le peuple américain vient de lui confier.

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